Au seul énoncé de son nom, on devinait déjà que l’on avait affaire à une personne faisant le bien pour tous, GOOD-ALL.
La primatologue, éthologue et militante Jane Goodall a disparu à l’âge de 91 ans ce mercredi 1er octobre, laissant derrière elle un héritage fort sur notre rapport aux primates, et plus largement aux animaux. Elle a révolutionné notre regard sur les grands singes et a questionné la conservation des habitats, et des espèces, depuis le début de ses recherches à l’été 1960 en Tanzanie dans le parc naturel de Gombe. Pour la première fois dans l’Histoire, elle va réussir à pénétrer l’habitat naturel des primates, les observer au plus près, et mettre au jour leurs facultés cognitives hors-normes. Cette découverte majeure est un tournant historique, et va apporter de nouvelles questions dans le domaine de l’éthologie et de l’anthropologie : les grands singes sont-ils des humains comme les autres ? Depuis ses recherches fondatrices, les évolutions des rapports entre les animaux et les humains ont tant à nous apprendre.
« Plus les perspectives sont sombres, plus je suis déterminée »
« Nous savons aujourd’hui que la baisse des émissions de CO2 reste insuffisante pour limiter le réchauffement à 1,5 °C, comme le prévoyait l’accord de Paris. Les experts du climat craignent une augmentation des températures jusqu’à 2 °C, voire plus. Si c’est le cas, il sera trop tard pour les populations les plus vulnérables et un certain nombre d’espèces.
Il reste une fenêtre de temps limitée, et j’ai l’espoir que les gouvernements et les entreprises commencent à prendre les choses au sérieux. Aux leaders mondiaux, j’adresse ce message : avant qu’il ne soit trop tard, cessez de soutenir les politiques d’extraction du pétrole et du gaz, augmentez les financements des énergies renouvelables, luttez contre la pauvreté et imposez aux très riches de réduire leur empreinte sur l’environnement, prenez des engagements ambitieux et, surtout, honorez-les ! Car vous n’avez pas honoré ceux que vous avez pris jusqu’à présent ».
« Leaders mondiaux, prenez des engagements ambitieux et honorez-les ! »
Honorons-la, souvenons-nous d’elle pour qui l’engagement individuel et local aussi est indispensable pour faire pression sur les entreprises et les responsables politiques.
« Beaucoup d’entre nous, et je pense tout particulièrement aux jeunes, ont le sentiment d’être à l’intérieur d’un long tunnel bien sombre. Nous devons faire face au changement climatique, au déclin de la biodiversité, à la déforestation, à la destruction des sols et des animaux dans des élevages industriels qui, en outre, rejettent dans l’atmosphère des masses de méthane toxique. Comment ne pas être découragés ?
Je reste cependant convaincue que nous devons garder espoir, car si nous abandonnons, nous condamnons les générations suivantes. L’espèce humaine n’est pas à l’abri de l’extinction. Tout au bout du tunnel brille la lumière. Il ne sert à rien de s’asseoir et d’espérer qu’elle vienne à nous. L’espoir ne consiste pas à attendre, il est dans l’action. En travaillant ensemble, nous pouvons au moins ralentir le changement climatique et la disparition des espèces.
Des milliers de jeunes de tous âges montent des projets au sein de notre programme « Roots and Shoots » dans 70 pays à travers le monde, comme ici, en France. Ils plantent des arbres, collectent du plastique, recyclent, font du bénévolat dans un refuge pour animaux. Dans tous les pays, je vois des gens passionnés qui se retroussent les manches. Ils sont prêts à faire leur part, alors faisons la nôtre, nous aussi ! » Jane GOODALL – Le Monde – Novembre 2023
L’engagement continue, notamment avec Sabrina Krief, vétérinaire et primatologue, professeure au MNHN, spécialiste d’écologie comportementale et de zoopharmacognosie et Emmanuelle Pouydebat, directrice de recherche au CNRS et au Muséum national d’histoire naturelle, spécialiste de l’évolution des comportements des animaux.